samedi 30 août 2014

[Livre] "Malavita" Tonino Benacquista



«Malavita» de Tonino Benacquista
Chez Gallimard

En quelques mots : La famille Black vient de s'installer en Normandie.  La famille Black est sous protection. Protection des témoins. Fred a dénoncé ses proches et sa famille mafieuse pour sauver sa peau et celle de sa famille. Mais partir à des milliers de kilomètres est-ce suffisant pour mettre à distance ces vieux démons?


  • En deux mots : mafia &  famille
  • En une question : qui a fait refera ?


SPOILER MI NIMIM

J'ai découvert "Malavita" par sa sortie au cinéma et je me suis dépêchée de le lire juste avant de le voir sur grand écran et je dois dire que je préfère l'avoir découvert ainsi car j'aurai sinon été bien surprise de lire ensuite les mots de Tonino Benacquista.

Un roman astucieux et malin qui nous montre les coulisses d'une famille d'un  mafieux qui a trahi les siens pour sauver sa propre famille. Définitivement Tonino Benacquista est astucieux. Astucieux pour les liens qu'il développe entre chaque personnage, astucieux pour la logique qu'il pointe du doigt et des mots, entre les faits et l'effet ricochet que peuvent avoir nos actes, je pense ici au journal du lycée ou la première journée d'école du fils. Astucieux de faire écrire ses mémoires à cet homme qui n'a jamais montré aucun sentiment ni aucun remords. Astucieux de faire prendre la parole au personnage principale a travers son livre et de mettre en pratique dans le livre même une police de caractère différente quand c'est lui qui écrit. Astucieux les personnages secondaires qui font avancer l'histoire et grâce à qui l'on devance l'histoire avant même le personnage central le coeur battant.

L'histoire est au fil des pages encore bien plus sombre et violente que le film ne l'ai lui même. En effet, la place de l'imaginaire ici va bon train. Fred et Maggie est un couple plutôt inédit dans ce que j'ai l'habitude de lire, mais leur amour n'en est pas moins présent. Warren, le fils est encore plus sombre, presque moins attachant, bien qu'il soit toujours aussi malin. Belle, la sœur est bien plus lisse et incolore finalement...

Mais le vrai petit plaisir de ce livre c'est découvrir aussi le lien entre Fred et son agent protecteur bien plus développé que dans le film, bien quelle soit sous-jaccente.

J'avais le casting en tête en lisant le livre et je dois dire que cela fonctionnait vraiment très bien !

Un livre à lire pour découvrir les petits détails manquants du film mais aussi pour y retrouver des moments clés. Je regrette juste de ne pas y avoir trouvé plus de description des liens entre cette famille, père et fils, père et fille, mari et femme mais le final si malin fonctionne admirablement aussi grâce à cela. L'auteur nous laisse toujours en attente, en alerte et c'est aussi bien ainsi finalement. A noter que la fin est légèrement différente au film et je trouve qu'elle fonctionne mieux ici.

ATTENTION SPOILER (surlignez le phrase ci-dessous si vous voulez le savoir sans lire le livre).
Il laisse sa fille dominer la fin de l'histoire et son le fils tremble d'être enfin ce qu'il souhaitait être...

En bref : Un roman sombre et froid autour d'une famille mafieuse qui a trahi les siens. Un rythme tenant et un enchainement astucieux qui nous tient en haleine.


Morceaux choisis / Citations :

« Ils prirent possession de la maison au milieu de la nuit. Une autre famille y aurait vu un commencement. Le premier matin de tous les autres. Une nouvelle vie dans une nouvelle ville. Un moment rare qu'on ne vit jamais dans le noir. »

« Pour la toute première fois de sa vie, Frederick Blake tenait en main une machine à écrire. Il la soupesa comme il l'avait fait avec ses propres enfants à leur naissance. Il la fit tourner sur elle même et en observa les contours, les angles, les mécanismes apparents, à la fois superbe d'obsolescence et d'une rare complexité, pleine de pistons, de cames et de quincaillerie savante. »

« Prêt à établir le contact, il se retrouvait seul face à cette machine, lui qui n'avait peut-être jamais ouvert un seul livre, lui qui parlait une langue directe et sans fioritures, et qui, de toute sa vie, n'avait rien écrit d'autre que des adresses sur des pochettes d'allumettes. Cette machine là permet-elle de tout dire ? Se demanda-t-il sans quitter les touches des yeux. »

« Warren commença son assiette par ce qu'il aimait le plus, les concombres, et Belle par ce qu'elle aimait le moins, les betteraves. »

« Combien vaut un homme ? Quel est le prix d'une vie humaine ? Savoir ce qu'on vaut, c'est comme connaître le jour de sa mort. Je vaux vingt millions de dollars. C'est énorme. Et bien moins que ce que je croyais. Je suis peut-être un des hommes les plus chers du monde. Valoir aussi cher et vivre une vie aussi merdique que la mienne, c'est le comble de la misère. »

« Un repenti, c'est pire qu'un immigré qui ne se sentira pas plus chez lui sur la terre qu'il a quittée que sur celle qui l'accueille. Moi, je ne serais plus jamais chez moi parmi les truands, mes frères, et les honnêtes gens ne me feront de place nulle part. Croyez-moi, repenti, c'est pire que tout. »

« Pour Warren, plus rien ne serait comme avant, plus question de ne plus saisir ce que les mots recelaient de puissance et de pièges. Il allait vite faire l'apprentissage de cet art capable de résumer le monde en une ou deux courtes phrases, de lui donner un sens pour, au bout du compte, le mettre en perspective. »

«  - Restez, insista Lemercier, je suis sûr que le film va vous plaire, il s'agit des Affranchis de Martin Scorsese, ça parle de la mafia à New York. Vous verrez, c'est très drôle et très instructif.
Fred se figea tout à coup, un bras dans la manche du blouson, le geste suspendu. Son regard lui avait glissé du visage. »

« Comme tous les mafieux, Fred adorait les films sur la mafia, la série du Parrain en tête de liste. C'était leur chanson de geste, elle leur avait donné une légitimité et les avait rendus luminueux aux yeux du monde. Entre confrères, ils n'aiment rien tant que reprendre les dialogues du film à leur compte, en mimer certaines scènes, et parfois, seules devant l'écran, la nuit, pleurer à la mort de Vito Corleone joué par Marlon Brando. »

« Le tam-tam s'était fait entendre en ville et la salle des fêtes se remplissait à vue d'oeil. La scène avait rendu Fred incandescent. Sa performance tenait à la fois du théâtreux et du conteur, un mélange de confession déguisée et de dramatisation. La lumière le lavait de ces dernières années de rancoeur et de renoncement. »

« La toute dernière à pousser les portes de la salle des fêtes fut Maggie. Elle s'avança lentement dans l'allée sans quitter des yeux cet homme sur scène qui lui en rappela un autre, un Giovanni dont elle était tombée amoureuse longtemps auparavant. »

Ici mon avis sur l'adaptation de Luc Besson 


En bref :
Une belle surprise, une belle adaptation pour un casting épatant. Un suspens bien présent, une famille sombre et attachante, un rythme équilibré, une touche d'humour, une mise en scène efficace font que l'on passe un bon moment. Un Luc Besson qu'il fait bon retrouver et un Robert De Niro au top de sa forme. Une adaptation libre mais idéale d'un roman bien plus sombre et froid. 

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